Même s’il n’y a pas de réveillon traditionnel, moins de confettis et de langues de belle-mère tirées, de feux d’artifice et de klaxons pour faire fuir les démons, moins de cris de joie, pas d’embrassades sous le gui, ni de compte à rebours collectif de l’année qui s’en vient, tous ces rites de passage qui datent de la nuit des temps et qui sont indispensables pour éloigner le mauvais sort et favoriser la chance, nous saurons nous adapter. Et nous pourrons au moins compter sur les 1 500 voitures brûlées la nuit de la Saint-Sylvestre pour éloigner de nous les mauvais esprits !
Certains trouveront malaisé de positiver en cette fin d’année, mais c’est néanmoins possible.
D’abord, commençons par une bonne nouvelle. Philippe Michel, l’oublié de la République dont je vous avais parlé il y a un an, ce pilote d’Air France condamné en première instance en Italie à 6 ans et 8 mois de prison ferme – à la suite de la collision entre son Mousquetaire à l’atterrissage et un hélicoptère au décollage du glacier italien du Ruitor, vient d’être autorisé à quitter sa résidence d’Aoste. Il semblerait que « justice » va lui être enfin rendue, que les accusations retenues tombent, se retournent même contre la partie adverse.
Ensuite, les vaccins Covid-19 sont en courte finale et cela représente un immense espoir pour nous tous dans les mois à venir, sans compter que c’est une prouesse scientifique, dont la rapidité interpelle, mais qui colle parfaitement à ce siècle : tout y va bien plus vite, il suffit d’observer nos glass cockpits bourrés d’électrons : non seulement la technologie y est totalement aboutie aujourd’hui – certains avions reviennent se poser tous seuls en cas de défaillance du pilote, sauvant ainsi les passagers – mais, en plus, les autorités de certification FAA et EASA distribuent les coups de tampon à la vitesse de ces mêmes électrons.
C’est donc un raccourci vers la sortie de crise, malgré la mode anti-vaccin ambiante car 99,9 % des vaccinations sont réussies, nous allons grâce à elles reprendre une vie normale à terme, relancer la machine sociale, économique et… voler sans masque !
Le point le plus positif est donc la reprise des vols, pour tout le monde. Avec quelques grincements de dents cependant, le sentiment par cetains d’avoir été méprisés par notre administration de tutelle, comme le font remarquer les fédérations (à lire dans ce numéro). Si le fait que les pilotes professionnels aient pu continuer à voler était acceptable, les responsables d’aéro-clubs – organismes de formation reconnus au travers de leur statut de DTO – ont été déçus de ce second confinement, alors que toutes les procédures sanitaires imaginables avaient été mises en place. Et même si des associations loi 1901, sans but lucratif, sont mal placées pour évoquer de la concurrence déloyale, elles sont en droit de s’interroger sur la façon de voir les choses de la DGAC, elle qui a autorisé les seuls ATO à continuer à former les futurs professionnels alors qu’elle sait bien que 70 % des pilotes de ligne font leurs premiers pas en aéro-club.
Mais est-elle vraiment responsable, notre DGAC, a-t-elle encore les commandes en main ? Sans doute pas, du moins depuis que la Covid a généré une loi d’exception nécessitée par l’état d’urgence.
Formulons donc le souhait pour l’année à venir que notre chère DGAC retrouve sa force de conviction habituelle, nécessaire pour permettre d’adapter notre mode de fonctionnement de manière réaliste, la situation sanitaire actuelle risquant de durer quelques mois encore et, surtout, qu’elle ait le pouvoir de le faire. Souhaitons aussi que les acteurs de l’aérien, les dirigeants des fédés et des associations retrouvent leur légitimité sociale afin qu’ils soient écoutés, entendus, et permettent ainsi éviter des choix discutables.
Souhaitons, et cela va avec ce qui précède, que nos assureurs maintiennent leurs garanties dans la mesure où le Code de l’aviation civile est respecté, qu’ils arrêtent de nous dire « qu’il y a grand risque à voler par ce mauvais temps juridique », qu’il vaudrait mieux nous abstenir, sauf à respecter les règles autorisées, même quand elles sont idiotes pour un aviateur. Souhaitons-leur de retrouver bon sens et honnêteté intellectuelle plutôt que d’ouvrir le parapluie et de s’appuyer sur la première clause juridique exploitable venue pour ne pas payer un sinistre.
Souhaitons enfin qu’on en revienne au vocable « aviation générale », pour lequel nous nous sommes tant battus, qu’on oublie « aviation légère » ou de « loisirs », des termes péjoratifs revenus fort à propos sur le devant de la scène car ils riment, pour le grand public, avec « riche qui pollue », ce qui est fort injuste.
Bon, l’espoir fait vivre, alors, hauts les cœurs, et meilleurs vœux !
Jacques CALLIES