La perturbation sociale qui traverse notre belle France en ce moment, un système dépressionnaire intellectuel accompagné de son lot d’averses, de tempêtes et de cyclones, est si complexe qu’il m’est difficile de savoir dans quelle direction vais-je décoller en ce petit matin blême de bouclage où je m’adresse à vous, assis derrière mon bureau, dans le silence de la Seine-et-Marne.
Mais je sais au moins que ce ne sera pas en N77GJ, devoir d’écriture oblige. Heureusement, du reste, car rien n’est plus déprimant que de patienter des heures dans un FBO à boire café après café alors que nos contrôleurs sont ailleurs que derrière leurs écrans. Sans doute suis-je mauvaise langue, peut-être qu’il n’y aura pas de perturbations aujourd’hui. Ou bien que Ryanair, qui, visiblement, ne supporte pas un esprit rebelle hérité de nos ancêtres les Gaulois, aura réussi à délocaliser le contrôle aérien français les jours de débrayage ! J’imagine déjà les « Bloody strikebreakers ! » anonymes sur les fréquences de contrôle en route. À sa décharge, il faut dire que la compagnie irlandaise, qui n’est déjà pas trop concernée par la retraite de ses propres pilotes, subit les humeurs des contrôleurs qui ont effectué treize jours de grève depuis le début de l’année, ce qui s’est déjà traduit par 300 vols annulés, 8 000 vols retardés et plus d’un million de passagers qui ont voué aux gémonies nos amis et probablement les grévistes français dans leur globalité.
Je ne vois d’autre solution que de faire le dos rond et de laisser passer l’orage.
Car il y a quand même de bonnes nouvelles. D’abord notre ministère de la Transition écologique, chargé des Transports, en résumé la DGAC en ce qui nous concerne, a compris l’un de nos problèmes d’intendance à la fois agaçant car injuste et coûteux et elle nous le prouve en s’apprêtant à publier au J.O. un texte sur une carte CIME, autrement dit carte d’identité de membre d’équipage, qui pourra être désormais délivrée – sous le contrôle de l’État – par les associations françaises représentatives de pilotes que sont l’AOPA France, le GIPAG, la FFA. Il était temps car, du fait de la réglementation européenne, une licence de pilote et une carte d’identité ne suffisaient plus pour avoir accès aux zones de sûreté à accès réglementé (ZSAR) des aéroports. Sans CIME, cela signifiait un accompagnement par un agent de sécurité depuis et vers son avion sur les aéroports munis d’une ZSAR, une prestation forcément facturée jusqu’à 80 euros sur certains aéroports européens.
Sur sa lancée, notre ministère de tutelle semble vouloir aussi rétablir un équilibre perdu, préserver de nouveau l’intérêt de tous, c’est-à-dire aussi celui des pilotes. Nous en voulons pour preuve un projet de studio de cinéma jouxtant l’aérodrome de Coulommiers, proche du secteur de Disney : il nous a été rapporté que ce complexe majeur, pourtant riche de promesses d’emplois, ne verra pas le jour si le cahier des charges exige bel et bien l’arrêt des vols pendant les tournages, ce qui signifierait l’arrêt de l’activité et la fermeture de l’aérodrome à terme. Voilà une position juste, espérons simplement qu’elle soit ferme et que les bruits de couloirs se confirment !
Un autre point de satisfaction est la perspective de nous retrouver bientôt à l’occasion de 50 ans de passion partagée avec vous : « Je viens avec beaucoup de retard de lire votre édito du numéro de février sur les 50 ans. Il m’a vraiment touché. Bravo et merci pour tout ce que vous avez apporté et que vous apportez encore à notre passion. À bientôt ! » Comme plein d’autres, ce message de Régis nous a fait réfléchir sur la dimension que nous voulions donner à notre fête. Notez-en déjà la date : il s’agit des 24 et 25 juin 2023, le dernier week-end du Salon du Bourget, événement qui devrait déplacer vers Paris bon nombre de lecteurs. Deux journées pour échanger, table ouverte et gratuite, du matin au soir, avec quelques surprises et, bien sûr, l’accès direct à nos bureaux par la voie des airs. Nous aurions aimé recommencer le coup du fly-in, refaire poser à Lognes 130 avions, dont le DC-3 de Gabriel Évêque, mais il n’en est plus question car il faut préserver la tranquillité de nos riverains.
Mais, avant cela, nous vous donnons rendez-vous au salon AERO de Friedrichshafen, sur notre stand hall A7, le jeudi 20 avril au soir pour des « happy hours » sur le thème « When past meets the future ». Il s’agira de fêter à la fois notre prétendue sagesse et, surtout, notre collaboration au « Mondial de l’Aviation » fondé par Willi Tacke.
Et, bien sûr, à Lyon-Bron sur notre stand de France Air Expo les 1, 2 et 3 juin où il ne sera absolument pas nécessaire de savoir parler anglais ou allemand pour commander sa bière !
Restons donc optimistes, après la pluie viendra le beau temps. Envolez-vous sereinement et n’oubliez jamais que vous pouvez compter sur nous comme nous comptons sur vous chaque mois.
Jacques CALLIES