L’été approche, voilà arrivé le temps de reprendre l’air, de satisfaire ce besoin d’expériences nouvelles, cette nécessité inscrite dans notre ADN de voyager au gré des vents et de nos envies, particulièrement exacerbées chez les pilotes, vers des lieux encore inconnus et les hommes qui les habitent, et notons que c’est pour cela qu’ont été imaginés les avions. Mais qui pense voyage au long cours pense à respecter une réglementation douanière qui varie régulièrement selon les époques et les pays.
De la même manière que nous vous avons fait part le mois dernier des nouvelles dispositions qui concernent le Royaume-Uni, premier territoire hors Schengen accessible depuis la France, nous traitons régulièrement du sujet et de sa complexité, aidés parfois par nos lecteurs, tel l’avocat Pierre Siegenthaler qui, avec une précision toute helvétique, nous avait rappelé les différences de réglementation entre les pays membres de l’Union européenne (UE) et simultanément de l’espace Schengen, les pays non-membre de l’UE, mais membre de l’espace Schengen (Islande, Liechtenstein, Norvège, Suisse), les pays membres de l’UE, mais non-membres de l’espace Schengen (Bulgarie, Irlande, Chypre, Roumanie, Croatie) et les pays non-membres de l’espace Schengen ni de l’UE…
Dès lors, il est clair que la France a toujours besoin de ses aérodromes douaniers et qu’elle doit résister à la tentation, qui lui prend régulièrement, de se désengager en supprimant des points de passage frontaliers, les fameux PPF.
Il n’y a pas si longtemps, la cartographie des PPF avait fait l’objet d’un examen par un groupe de travail piloté par le ministère de l’Intérieur, présidé par le directeur de l’Immigration, et associant les Douanes et la Direction générale de l’aviation civile (DGAC), le ministère de l’Intérieur ayant laissé entendre qu’il fallait s’interroger sur le maintien d’une vingtaine d’entre eux, comme Troyes, Annecy ou Angoulême, dont l’activité de contrôle des vols extra-Schengen pouvait paraître disproportionnée au regard des moyens mobilisés.
Collaborateur à l’époque du député Pierre Cabaré, vice-président de la Commission aéronautique et spatiale, nous avions fait valoir, par une question écrite au gouvernement, un impact négatif sur les territoires concernés pour des raisons d’attractivité économique, et aussi écologiques, puisque l’empreinte carbone de nos avions est « le » problème du siècle. D’autant que, sur les aéroports ciblés, le service était très majoritairement effectué par la Douane par délégation de la Police de l’air et des frontières. Aucun effectif n’était donc basé sur l’aéroport, les agents provenant de brigades à proximité, cette mission s’ajoutait à leurs missions principales, l’éventuel arrêt de la mission n’engendrant donc pas une évolution des effectifs. Nous avions, bien sûr, mis l’accent sur le fait que fermer un PPF, c’était fermer un service de mobilité essentiel pour l’aviation régulière, d’affaires et de loisirs.
Et, dans une réponse à l’assemblée, ce qu’il n’est pas obligé de faire, le gouvernement nous avait fait comprendre, sans anticiper les conclusions de ce groupe de travail, que l’attractivité économique liée à un aéroport qualifié PPF était un critère pris en compte dans les réflexions en cours, « précisant que l’aéroport qualifié PPF devait respecter les exigences minimales issues du Code Frontière Schengen (CFS) qui supposent notamment un trafic extra-Schengen suffisant, la mise aux normes de ses infrastructures et l’absence de PPF à proximité pouvant absorber le trafic ». Une réponse satisfaisante puisqu’elle avait, qui sait, fait réfléchir le groupe de travail en question.
Aussi, sommes-nous très surpris aujourd’hui en apprenant que l’aéroport du Castellet serait susceptible de perdre son PPF. Notez que cela ne nous a pas été confirmé, le desk est resté vague sur le sujet, le nouveau directeur n’a pas jugé utile de nous rappeler. Mais notre source est fiable.
Il est donc inacceptable que cet aérodrome, dédié à la Formule 1, la vitrine du sport automobile – le circuit Paul Ricard et son Grand Prix de France ont un retentissement mondial –, puisse voir son avenir compromis. Surtout après que son gestionnaire a rénové la piste et changé l’ensemble du balisage et des automates de gestion, des travaux qui ont coûté plus de 4 millions d’euros, financés en intégralité par la société Aéroport du Castellet.
Cela ne se peut, n’est-ce pas, et pourtant, c’est bien arrivé aux aérodromes d’affaires de Toussus-le-Noble, de Pontoise, de Dieppe, de Lannion et bien d’autres encore. Ils n’ont jamais recouvré leur PPF, malgré toutes les pressions politiques imaginables, jusqu’à celle d’un Premier ministre.
Puisse donc ce plaidoyer être transmis aux hommes de bonne volonté qui, je n’en doute pas, détiennent le pouvoir de vie ou de mort sur nos aérodromes secondaires par le maintien ou l’attribution d’un PPF. Et, par là, sur notre possibilité de voyager sans escale inutile et coûteuse, avec une empreinte carbone la plus réduite possible. Merci d’avance !
Jacques CALLIES